Lysias, Contre Eratosthène

Fiche d'œuvre

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Κατὰ Ερατοσθένους

Contre Eratosthène

Lysias

• Date de parution : Entre - 404 et - 380.

• Genre : Discours/Réquisitoire

• Éléments biographiques :

- Lysias, né à Athènes en 440, mort vers 380 av. J.-C., est l'un des dix orateurs attiques retenus par le Canon alexandrin.
- Lysias est un métèque (étranger domicilié dans une cité, autre que celle dont il est originaire). Il devient par la suite isotèle, c'est-à-dire étranger privilégié.
- Il est élevé avec les fils de la haute société athénienne puis à quinze ans part à Thourioi rejoindre la colonie nouvellement fondée en Grande Grèce, où il étudie la rhétorique.
- De retour à Athènes suite à l'échec en 412 av. J.-C. de l'expédition athénienne en Sicile, il y exerce le métier de rhéteur et exploite avec son frère Polémarque une fabrique de boucliers. Ils acquièrent ainsi une fortune qui leur attire des ennuis sous la dictature des Trente Tyrans.
- Tous deux sont arrêtés (404 av. J.-C.) comme suspects : Lysias réussit à s'échapper à Mégare mais son frère est mis à mort.
- En 403 av. J.-C., il intente un procès au meurtrier de son frère, Ératosthène, l'un des Trente Tyrans. Cette affaire met en relief son talent d'orateur, et dès lors il se fait logographe¹.
- Le discours Contre Ératosthène (l'un des Trente, responsable de la mort de son frère), est le seul qu'il ait prononcé lui-même. Les autres ont été écrits pour des clients, à charge pour eux ensuite de le prononcer, à l'occasion de procès de plus ou moins grande importance : dans l'un d'eux, par exemple (Pour l'invalide), un vieillard plaide pour que l'État lui maintienne sa petite pension d'indigent.

• Epoque

- En 404, l'empire athénien est à terre et Sparte elle-même est usée par la guerre. À Athènes, s'élève une très violente réaction contre la démocratie, rendue responsable de l'échec de la guerre : le pouvoir est confié aux Trente, gouvernement oligarchique qui mène une politique de terreur à l'encontre des plus riches parmi les métèques. Parmi ces trente tyrans, on compte Théramène, un oligarque modéré, Critias, parmi les plus cruels, Ératosthène, un personnage plutôt modéré. À cette époque, plus de 1500 citoyens sont mis à mort, sans compter les métèques. On compte aussi de très nombreuses confiscations de biens. Théramène, qui s'oppose à cette politique de terreur, est assassiné par Critias.
- Les partisans de la démocratie se regroupent alors en Béotie sous le commandement de Thrasybule. Lysias soutient financièrement ce mouvement. Les démocrates, après une lutte fratricide, s'emparent du Pirée et renversent les Trente à la bataille de Munichie. Ils décrètent l'amnistie, sauf pour les Trente, et obligent les oligarques à rembourser leurs dettes.
- Le rôle d'Ératosthène, dans cet épisode sombre de l'histoire d'Athènes, nous est connu par Lysias uniquement. Le système de défense d'Ératosthène consiste à dire qu'il était allié à Théramène, mort pour s'être opposé à une politique de terreur. Il n'a, selon lui, rien à se reprocher : la preuve, il n'a pas pris la fuite et fut soumis à la reddition de comptes. Or, le jury qui examine les comptes est composé, pour la plupart, de propriétaires terriens qui ne sont pas hostiles à la réhabilitation d'un modéré comme Ératosthène. La tâche de Lysias est donc difficile: il va devoir déployer tous ses talents d'orateur dans ce procès qu'il intente contre celui qu'il considère comme responsable de la mort de son frère.

• But de l’œuvre

- Obtenir la condamnation à mort ou au moins la punition de celui qu’il considère comme responsable du meurtre de son frère Polémarque.
- Ce discours est le plus important et le plus étendu des discours de Lysias. C'est le seul et le premier discours qu'il ait prononcé lui-même devant un tribunal (fin 403). On y trouve de précieux renseignements sur les sentiments politiques de l'orateur, mais aussi sur l'histoire d'Athènes à la fin de la guerre de Péloponnèse, sous la tyrannie des Trente et après le rétablissement de la démocratie.
- On lui attribue 425 discours, dont 233 authentiques, selon Caecilius et Denys d’Halicarnasse. 172 titres nous ont été transmis, tandis que le corpus donné par la tradition manuscrite se limite à 31 discours.
- Il composa un plaidoyer pour Socrate lors de son procès, mais celui-ci refusa de s’en servir.

• Structure

1-3: exorde

§ 4-36: la narratio

§ 4: la narration commence par quelques renseignements sur la vie de Lysias et de sa famille

§ 5-22: récit de la mort de son frère Polémarque

§ 37-91: les pisteis

§ 37-41: argumentation destinée à établir la responsabilité de l'accusé et à réfuter ses excuses

§ 41-55: Lysias transforme le procès privé en procès politique en faisant partager à Ératosthène la responsabilité des crimes des Trente: il retrace d'abord la carrière politique de son adversaire;

§ 55-62: il s'en prend ensuite aux personnages dont l'accusé se réclame, Phidon et surtout Théramène.

§ 74-91: il revient enfin à Ératosthène pour dénoncer la grandeur de ses crimes et demander un châtiment rigoureux.

§ 91-99: epilogos ou péroraison

§ 93-98: appel aux deux partis de la ville et du Pirée.

§ 98-99: Lysias évoque le souvenir des morts qu'il faut venger.

• Postérité

En la matière des πίστεις, Denys d’Halicarnasse trouve L. décevant, et Cicéron le trouve réservé.

• Citations :

« οὐκ ἄρξασθαί μοι δοκεῖ ἄπορον εἶναι, ὦ ἄνδρες δικασταί, τῆς κατηγορίας, ἀλλὰ παύσασθαι λέγοντι: » [1] Exorde
Ce n’est pas de commencer l’accusation qui me semble embarrassant, messieurs les juges : mais de l’arrêter quand j’aurai pris la parole.

1Désigne les rédacteurs professionnels de discours judiciaires de la Grèce antique.